Des exemples de bonnes pratiques
Philippe Biéler
ancien Président de Patrimoine suisse
Des exemples de bonnes pratiques
Philippe Biéler
ancien Président de Patrimoine suisse
Les chiffres varient selon les études et selon les critères retenus, mais peu importe : ils sont énormes. La Suisse aurait besoin de plus d’un million de logements pour personnes handicapées ou à mobilité réduite ! A cela s’ajoute la nécessité de places de travail adaptées, de facilités dans les déplacements et les communications, d’accessibilité dans les lieux et bâtiments publics, etc. On le voit, la tâche est gigantesque, ardue ! D’autant plus encore que trop de maîtres d’ouvrage, de promoteurs, d’architectes et de maîtres d’état négligent ces impératifs … .
Tous ces besoins sont absolument légitimes. Et pourtant ils se heurtent parfois à d’autres nécessités, qui rendent la problématique encore plus complexe.
Les constructions nouvelles ne posent en principe pas de problèmes particuliers (sauf en cas de négligence de la part de ceux qui en sont responsables !). En effet, il est en général assez facile de prévoir les mesures adéquates pour faciliter la vie et les déplacements des handicapés lorsqu’on part de zéro et qu’on fait du neuf.
La chose se complique déjà lorsqu’on intervient dans de l’existant et qu’il s’agit d’y faire des rénovations ou des transformations. La marge de manœuvre se réduit, et l’on touche de surcroît rapidement à des questions financières et économiques. Mais on sait aujourd’hui, sur la base de toutes les expériences accumulées, qu’avec un peu de bonne volonté et d’imagination, on arrive à trouver des solutions adéquates.
Là où la chose se corse encore davantage, c’est en ce qui concerne les bâtiments et sites historiques. Voilà des objets qui appartiennent à notre patrimoine, qui font partie de notre héritage et face auxquels nous avons des responsabilités. Jusqu’où va-t-on les modifier, voire porter atteinte à leur substance, pour les rendre accessibles aux handicapés ?
Relativisons un peu le problème : seuls 5 à 10 % de l’ensemble des bâtiments sont concernés. Et surtout, là aussi l’expérience nous apprend qu’en cherchant bien et en consultant tous les milieux concernés dès le début des réflexions, on finit en général par dénicher la réponse qui satisfait tant aux besoins des handicapés qu’à ceux du patrimoine.
C’est le grand mérite de la présente plaquette de montrer des exemples de bonnes pratiques à cet égard. Feuilletez la et vous serez étonné(e) des solutions trouvées ici et là ! Et pas seulement dans des bâtiments : la rue, les espaces publics ou les milieux naturels sont des cadres dans lesquels il convient aussi d’intervenir avec finesse, doigté et créativité ; nous en trouvons de belles illustrations dans les pages qui suivent.
La patrimoine bâti subit actuellement toutes sortes de pressions. Qu’il s’agisse de la réduction des subventions publiques, de l’accroissement des exigences et prescriptions liées à la sécurité (incendie, etc.), des programmes d’assainissement énergétique (nécessaires mais parfois excessifs) ou encore des mesures tendant à densifier la ville (là aussi une bonne chose en soi, mais parfois mal interprétée), le patrimoine se retrouve souvent négligé, maltraité ou même carrément atteint dans sa substance. Je dirais qu’il n’a actuellement pas une grande cote ! Ou que nombreux sont ceux qui privilégient manifestement d’autres objectifs.
En toute chose, l’esprit de géométrie peut aboutir à des catastrophes. Il faut savoir garder la mesure et éviter toute règle absolue. Il en va de même vis-à-vis des mesures en faveur de l’accessibilité des handicapés. Faisons une pesée des intérêts, en considérant de bonne foi les divers facteurs sur pied d’égalité ! Et sachant qu’il est possible de trouver des solutions dans la majorité des cas, admettons aussi parois des exceptions : là où le patrimoine serait vraiment trop pénalisé ou atteint, acceptons de renoncer au perfectionnisme. Sans quoi l’on tombera dans l’absolutisme !
Philippe Biéler
Président de Patrimoine suisse